Contrôle des comptes de la copropriété.

Contrôler les comptes de la copropriété, est ce bien raisonnable puisque le conseil syndical assure déjà cette mission ? De plus la gestion de la copropriété ce n’est pas mon affaire mais celle du syndic, il est payé pour cela ! Pour finir, la comptabilité c’est compliqué et c’est le travail des professionnels !

C’est le raisonnement de la quasi totalité des copropriétaires qui préfèrent faire confiance au syndic et au conseil syndical pour assumer cette responsabilité, cependant, même si le syndic fait très bien son travail et que le conseil syndical détient votre totale confiance, ils ne sont pas à l’abri de faire des erreurs. Vérifier les comptes, ne peut pas faire de mal et cette initiative, tout comme votre présence à l’assemblée générale, montre l’intérêt que les propriétaires apportent au suivi de leur résidence !

Pour cela, il ne suffit pas de survoler les annexes jointes à votre convocation et se contenter de vérifier votre consommation d’eau ou s’assurer que votre voisin est à jour de ses charges. Sans éplucher l’ensemble des dépenses, il faut toutefois prendre le temps de faire quelques contrôles sur la tenue générale de la comptabilité pour vous donner une idée de la qualité du travail du syndic et ensuite s’attacher à quelques postes de dépenses qui semblent déraper d’une année sur l’autre ou des factures qui posent question quant à la répartition de leurs montants dans les différents immeubles de la copropriété.

Préambule.

Avant d’amorcer la lecture de cet article, n’hésitez pas à revenir sur celui intitulé : « la comptabilité de la copropriété » publié en septembre.

Pour ceux qui n’ont pas le courage de refaire cette lecture, en voici un petit résumé.

La mise en place des nouvelles règles de comptabilité est intervenu par l’application, au 1er janvier 2007, de la loi SRU de 2005 (Solidarité et Renouvellement Urbain). A cette date, les syndics ont du adopter une comptabilité d’engagement en remplacement d’une comptabilité de trésorerie. Cette nouvelle méthode comptable nécessite l’établissement d’un budget prévisionnel.

Auparavant, les comptes étaient difficilement vérifiables entraînant la dérive de certains syndics, peu scrupuleux à faire fructifier à leur profit les fonds placés de leurs clients. Les nouvelles règles imposées par la comptabilité d’engagement nécessitent une comptabilité en partie double ou chaque opération est enregistrée deux fois, au débit et au crédit, avec l’obligation de gérer les comptes de la copropriété sur un compte bancaire indépendant de celui du syndic. L’application de ces nouvelles règles permettent aujourd’hui de vérifier plus facilement la justesse des opérations par un contrôle des balances qui doivent être équilibrées entre les comptes.

Un petit rappel sur les comptes de la copropriété qui se répartissent en 5 classes :

  • Classe 1 Provisions, avances, subventions et emprunts ;
  • Classe 4 Copropriétaires et tiers ;
  • Classe 5 Comptes financiers ;
  • Classe 6 Comptes de charges ;
  • Classe 7 Comptes de produits.

Les sous comptes organisés à la suite des comptes principaux différencient entre elles les opérations et pour exemple le contrat d’entretien de nettoyage des locaux sera enregistré :

  • Classe 6 : Compte de charges.
    • 61 : Services extérieurs.
      • 614 : Contrat de maintenance
        • 61400500 Entreprise de Nettoyage

Les règles de gestion sont fixées dans l’arrêté du 14 mars 2005 relatif aux comptes du syndicat des copropriétaires.

Avant de poursuivre rappelons les 3 documents comptable nécessaires au syndic pour la tenue de sa comptabilité :

  1. Un livre journal , sur lequel sont inscrits au jour le jour les opérations comptabilisées ;
  2. Un grand livre où les opérations sont reportées dans les comptes ;
  3. Une balance générale qui résume les soldes des comptes en fin d’exercice.

De nos jours, ces documents sont établis essentiellement sur support dématérialisés.

Dans un délai maximum de 6 mois qui suivent la fin de chaque exercice comptable (1 an), les copropriétaires sont appelés dans le cadre de l’assemblée générale à approuver les comptes et voter le budget de l’année suivante.

Pour orienter leur décision de vote, chaque copropriétaire reçoit obligatoirement avec sa convocation un résumé de la comptabilité présenté sous 5 tableaux :

  • Annexe 1 : État financier après répartition ou situation de trésorerie à la clôture de l’exercice.
  • Annexe 2 : Compte de gestion générale et budget prévisionnel.
  • Annexe 3 : Compte de gestion détaillée avec la répartition pour les opérations courantes de l’exercice clos et le budget prévisionnel de l’exercice.
  • Annexe 4 : Compte de gestion pour travaux et opérations exceptionnels.
  • Annexe 5 : État des travaux et opérations exceptionnels non clôturés à la fin de l’exercice faisant apparaître le réalisé et le non réalisé des travaux.

Pour finir sur ce résumé préparatoire, rappelons que l’article 18.1 de la loi du 10 juillet 1965, complété par le décret d’application n°67-223 du 17 mars 1967 impose au syndic de laisser aux copropriétaires la capacité de contrôler les pièces justificatives des charges. La durée de ce contrôle qui ne peut être inférieure à un jour ouvré doit être, en tous cas, appropriée à la dimension de la copropriété. Cette facilité doit être proposée entre la notification de la convocation et la tenue de l’assemblée générale.

Contrôler les comptes de la copropriété avant l’assemblée générale.

La préparation.

Il faudra commencer par s’assurer sur la convocation de la mention faisant état de la mise à disposition des pièces comptables pour effectuer ce contrôle, ainsi que le lieu et les horaires proposés. L’absence de cette mention justifierai l’annulation de la décision d’approbation des comptes lors de l’assemblée générale.

Les annexes comptables transmises avec la convocation sont un récapitulatif qui permettent de visualiser rapidement les charges, cependant vous ne voyez apparaître que le total d’un compte ou sous-compte.

Il n’est pas question de reprendre le travail du conseil syndical, qui dans le cadre de sa mission, a accès à l’ensemble des documents comptables (grand livre) et qui devra rendre compte de sa mission de vérification lors de l’assemblée générale. Il faut donc vous orienter vers les points qui vous semblent litigieux et pour cela procéder à une préparation en amont.

Important : Préalablement à l’examen des annexes il est primordial de rappeler que la comptabilité avant d’être des chiffres, ce sont des mots et du français en ce qui nous concerne. Il faut donc connaître la définition et le sens de certains termes pour comprendre les chiffres qui se cachent derrière.

  • CRÉANCE : C’est le droit d’obtenir une prestation ou un remboursement auprès de quelqu’un.
  • DETTE : Somme d’argent dû à quelqu’un.

Pour préciser le sens de ces termes de comptabilité dans la lecture des annexes, il ne faut pas raisonner par rapport à soi mais par rapport au syndicat des copropriétaires dont on fait partie et faire la lecture en comprenant les termes de la façon suivante :

  • CRÉANCE : prestation ou somme d’argent qui nous est dû au syndicat des copropriétaires.
  • DETTE : Somme d’argent dû par le syndicat des copropriétaires que nous devons à un prestataire ou à un tiers.

L’annexe 1 est l’état après répartition au jour de la clôture de l’exercice.

Nous ferons confiance aux capacités de calcul des tableurs informatiques et logiciels de gestion pour ne pas nous appesantir sur les correspondances et les reports de chiffres entre les tableaux. Les erreurs si il-y-a, sont en règle générale des erreurs de saisie par l’agent comptable et le contrôle des balances, rappelle ce dernier à l’ordre pour y remédier. Nous concentrerons notre attention dans les cadres des CRÉANCES et DETTES en 2ème partie du tableau :

Dans la classe 4 des copropriétaires et tiers :

  • Le « compte 45, des copropriétaires », la somme inscrite dans le cadre des CRÉANCES, indique le montant encore redevable par les copropriétaires à la copropriété et à contrario celle inscrite dans le cadre des DETTES représente le montant trop-versé par les copropriétaires. Conformément à l’article 18-1 de la loi du 10 juillet 1965, la situation des copropriétaires à la date de clôture de l’exercice est jointe à l’annexe 1 ;
  • Le « compte 46, débiteurs et créditeurs divers », la somme inscrite dans le cadre des CRÉANCES, indique qu’un ou plusieurs tiers doivent de l’argent à la copropriété. Dans ce cas, il est intéressant de connaître le(s) nom(s) et les dispositions prises par le syndic pour apurer cette créance. Si la somme est inscrite dans le cadre des DETTES, il peut s’agir d’un copropriétaire vendeur parti en laissant un crédit à la copropriété et dans ce cas, c’est la copropriété qui est redevable. Dans cette situation, sous réserve de lui rendre son dû, le montant de cette dette pourra être conservée par la copropriété après un délais de prescription de 5 ans.
  • Le « compte 47, d’attente », regroupe les opérations qui ne peuvent être imputées de façon certaine à un compte et qui nécessitent une information complémentaire. Toutes les opérations portées dans ce compte doivent être imputées au compte définitif rapidement et si elles ne peuvent être soldées à la fin de l’exercice, elles doivent pouvoir être justifiées ligne à ligne.
  • Le « compte 48, de régularisation » sont les montants répartis sur plusieurs exercices et dont les prestations interviendront ultérieurement.
  • Le « compte 49, dépréciation de comptes de tiers » est affiché lorsque une créance reste impayée malgré les mises en demeures et interventions, il conviendra alors de la considérer comme une créance douteuse risquant d’être déprécier au détriment du syndicat des copropriétaires.

Tous les comptes ci dessus doivent pouvoir être justifiés ligne à ligne et il faudra en demander le détail pour avoir l’historique des erreurs.

Dans les annexes 2 et 3, il est intéressant de faire un récapitulatif sur les 5 dernières années dans les lignes qui vous interpellent. Ce travail permet de connaître l’évolution des dépenses et les incidents qui s’intercalent dans la linéarité de ces charges et doivent ainsi trouver une explication. C’est le cas pour les consommations d’eau commune, les contrats de maintenance, etc. Idem pour les dépenses excessives qui doivent se justifier par la présentation des factures.

L’annexe 2 vous donnera une vue d’ensemble ainsi que le solde de l’exercice affecté aux copropriétaires, l’annexe 3 vous précisera le détail des différents postes communs à l’ensemble de la copropriété et ceux relatifs aux différents immeubles ou entrées.

Après avoir relevé dans les pièces annexes des motifs de contrôles, vous pourrez vous rendre au rendez-vous fixé par le syndic dans la convocation.

Le contrôle

Selon l’article 18-1 de la loi du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété « Seules les pièces justificatives des charges de copropriété, les factures, les contrats de fourniture et d’exploitation en cours et leurs avenants ainsi que la quantité consommée et le prix unitaire ou forfaitaire de chacune des catégories de charges, sont tenues à la disposition de tous les copropriétaires par le syndic. »

Le contrôle individuel par le copropriétaire se limite donc à la consultation des pièces ci-dessus et ce dernier devra orienter ses recherches à partir de la préparation effectuée à l’aide des annexes transmises avec la convocation. Il pourra se faire assister dans son contrôle par un membre du conseil syndical.

Ces pièces justificatives originales doivent être présentées par catégories.

  • Assurez vous dans un premier temps du classement différencié par catégorie ainsi que l’encodage de classement clair des pièces justificatives . Ce classement doit permettre au comptable de retrouver facilement les pièces demandées.
  • Ensuite, il faudra orienter votre contrôle en vous basant sur votre connaissance de la copropriété et la mémoire des travaux réalisés. Pour exemple, des travaux de réparation de carrelage ont été effectué dans plusieurs endroits de la copropriété donnant lieu à une facturation unique. A la connaissance du travail effectué dans l’immeuble qui vous concerne et le repérage que vous aurez effectué dans les autres entrées, interrogez vous de connaître auprès du comptable ou du membre du conseil syndical qui vous accompagne, quelles ont été les règles de répartition de la facture. Au vu de cette répartition, est-ce que l’imputation aux différents immeubles vous semble réaliste ?
  • Autre exemple au regard des consommations d’eau de la copropriété sur plusieurs années vous avez constaté selon les années des écarts importants sur la consommation commune (arrosage, nettoyage). S’agit-il d’une fuite ? A t-elle était prise en compte et fait l’objet d’un dossier auprès du fournisseur ou de l’assurance ? Est-ce un problème de compteur individuel et dans ce cas les erreurs de relevage ont-elles été supportées par l’ensemble des copropriétaires ?

Les contrats peuvent également être une bonne source d’information pour relever des erreurs entre les conditions d’application de maintenance édictées sur les documents et les prestations que vous constatez dans les domaines de l’entretien des communs, des espaces verts ou de la maintenance des installations.

Entre autres contrôles, assurez vous enfin de l’application du bon taux de TVA. La TVA à 10 % est applicable pour les travaux dans les parties communes des immeubles collectifs affectés pour plus de 50 % à l’habitation. Il s’agit des travaux d’amélioration, de transformation, d’aménagement et d’entretien et de la fourniture de certains équipements. Par travaux, il faut entendre la main d’œuvre mais également les matières premières ainsi que les fournitures. Pour que la TVA à 10 % soit applicable, les travaux doivent être réalisés dans des locaux à usage d’habitation achevés depuis au moins deux ans. Les dépendances des logements (caves, garages, etc.) bénéficient également de la TVA à 10 %.

Conclusion

N’ayant pas accès à tous les documents comptables, il vous sera difficile de détailler les différentes lignes comptables, cependant le copropriétaire peut formuler des observations sur les documents consultés ou sur les prestations réalisées dans le cadre des contrats. Si elles révèlent une erreur manifeste, le syndic peut en tenir compte mais doit en aviser le conseil syndical préalablement. Dans certains cas, les erreurs avérées, relevées par un copropriétaire peuvent être de nature à entraîner la mise en cause de la responsabilité du syndic et du ou des membres du conseil syndical préposé(s) au contrôle des comptes.

A suivre, les comptes de travaux exceptionnels..

P.A

Référence :

Légifrance : Loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis

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